« Du 15 au 28 janvier 1945, c’était la retraite de notre unité basée à Godz-Stary (Pologne) qui s’installa ensuite à Jessnitz (Allemagne). Encerclement par les chars russes, plusieurs camarades tués à côté de moi, dégagement réussi puis fuite pendant douze jours par un froid intense. Ruée en trois colonnes sur les routes verglacées, jour et nuit. Exode hivernal où se mélangeaient soldats allemands et convois civils. Scènes horribles provoquées par les chasseurs russes : villages et voitures en feu, femmes et enfants écrasés, tués, blessés abandonnés, faim et froid. Bref, les horreurs de la guerre en style explosif très abrégé !

Capturé en Tchécoslovaquie par les Américains le 9 mai 1945, j’ai été livré quatre jours plus tard aux Russes. Nous avons marché du 13 au 17 mai 1945 de Nettolitz (Tchécoslovaquie) à Edelsbach en Autriche. Dans la colonne forte de 18 000 prisonniers, ceux qui ne pouvaient plus suivre étaient tués. Reconnus par leurs gardiens, ont également été tués sur place les Russes Blancs (Biélorusses) portant l’uniforme allemand. Des viols furent commis en cours de route.

Nous avons été transportés en chemin de fer d’Edelsbach à Constanza en Roumanie du 9 juillet au 8 août 1945. Enfermés un mois, sans pouvoir sortir, nous étions parqués dans des wagons-à-bestiaux, dont l’intérieur était divisé en deux stalles par un faux-plafond installé à mi-hauteur. Toujours couchés, nous y avons subi la chaleur accablante, la faim, la soif, la dysenterie, les poux et de nombreux cas de décès.

A la sortie du train, tous les prisonniers étaient amaigris, malades, à peine en état de se tenir debout. Moi-même j’ai été atteint de furonculose, avec les bras enflés et douloureux. Fiévreux, et en l’absence de tout traitement possible, je n’ai connu ni personnel sanitaire ni médicaments au camp de Constanza. J’ai vécu pendant un mois dans la hantise d’un empoisonnement du sang qui aurait pu m’être fatal.

J’ai pu être sauvé in extremis au camp américain de Fallersleben, lors de mon rapatriement du 8 septembre 1945. J’ai traîné le bacille de la furonculose dix ans encore après guerre, avec des récidives deux à trois fois par an.

 

Je me rappellerai toujours du sentiment d’angoisse incommensurable que j’ai éprouvé lorsque, en juillet 1945, le train qui m’emmenait vers l’Est (vers la Roumanie), fila dans une direction contraire à celle qui devait me ramener vers ma femme et mon enfant. »

Weitersinger Robert, né en 1919

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