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Farébersviller dans la tourmente

 A la veille de la seconde guerre mondiale, Farébersviller est un petit village paisible de 589 habitants. La plupart des hommes sont des mineurs-paysans possédant une petite exploitation agricole (vaches, animaux domestiques, train de cultures, vergers...) . Le ban de Farébersviller d’une superficie de 687 ha constitue un ensemble géographique situé au Nord du plateau lorrain, légèrement à l’Est par rapport à la vallée de la Rosselle. Le centre du village est un vallon abrité par les hauteurs du Winterberg (316m), du Biehl (311m), et du Blauhubel (307m). C’est un secteur frontalier d’une importance stratégique qui a toujours été convoité au fil des siècles. Farébersviller constitue un nœud essentiel de communications routière et ferroviaire, à l’Est de Saint- Avold et forme un verrou entre les routes de Saint-Avold-Sarreguemines-Béning.

Les prémices de la guerre

Hitler avait défini dès 1924 dans son ouvrage Mein Kampf les objectifs du parti national-socialiste qu’il avait fondé :

- mettre à bas le traité de Versailles,

- agrandir vers l’Est de l’Europe l’espace dont l’Allemagne avait besoin,

- régénérer la race aryenne en éliminant les populations impures, au premier rang desquelles il plaçait les Juifs et les Tziganes,

    qu’il jugeait socialement nuisibles,

- intégrer tous les peuples de langue germanique au Reich Allemand (la Moselle sera annexée le 30 novembre 1940).

 

Hitler est porté au pouvoir en janvier 1933 parce que l’Europe sombre dans une terrible crise économique et surtout l’Allemagne qui compte à cette période-là 8 millions de chômeurs. Les discours et la propagande électrisent les foules ; le Chancelier du Reich jette ses ennemis politiques dans les camps et dote l’Allemagne d’une armée gigantesque.

L’audace de Hitler croît avec son succès, l’Italie de Mussolini devient son amie, le Japon également. Coup sur coup, à partir de 1938, il annexe l’Autriche, les Sudètes puis la Bohême et la Moravie. Les gens ressentent une certaine inquiétude avec l’arrivée du Führer au pouvoir et les évènements alarmants qui se sont succédé outre-Rhin ne plaident pas pour la sérénité. Le pape demande de prier pour la paix. Les villages situés en avant de la ligne Maginot accueillent les militaires français.

Tout le monde s’interroge : est-ce la guerre ? Daladier et Chamberlain sauvent provisoirement la paix à la conférence de Munich fin septembre 1938. Si les chevaux des cavaliers français font le bonheur des enfants du village, leur présence laisse planer la peur de la guerre (photo prise rue de Cocheren après le pont SNCF). Durant l’été 1939, la Pologne est menacée à son tour ; la France et la Grande-Bretagne ont promis de la défendre. A la hâte, elles essaient de nouer avec l’URSS une coalition anti-hitlérienne. Mais, à la surprise de tous, c’est Hitler le plus habile : il réussit à conclure avec Staline un pacte de non- agression germano-soviétique, le 25 août 1939. Une semaine plus tard, le 1 er septembre 1939, son armée entre en Pologne. Par décret du Président de la République, la mobilisation des armées de mer, de terre et de l’air est ordonnée aussitôt.

La France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre le 3 septembre 1939. Mais pour toute la population, le 1 er septembre est surtout le jour de l’évacuation. Une circulaire préfectorale arrive à la mairie pour intimer l’ordre d’évacuation générale à tous les villageois. Au son du tocsin, dans une église «angoissée», les dispositions prévues ont paru dures à tout le monde :

- laisser la maison, les animaux, les meubles, la vaisselle et tous les biens durement acquis au fil des générations,

- tout quitter en n’emportant que 30 kg de bagages,

- fuir au milieu des convois de charrettes, marcher à pied,

- partir vers l’inconnu pour un long et pénible voyage alors que l’on n’a jamais encore quitté sa région natale.

 

Le périple va durer neuf interminables jours ; les villageois vont d’abord effectuer une centaine de kilomètres à pieds avant d’être véhiculés dans des wagons à bestiaux vers l’Intérieur. Les arrêts sont nombreux pour laisser passer les trains militaires. Le 10 septembre, les Farébersvillois sont accueillis par les habitants du petit village de Bonnes en Charente.

 

Distribution de nourriture aux Réfugiés de Farébersviller et leur arrivée sur le pont d’Aubeterre en Dordogne.

La Drôle-de-guerre (der Sitzkrieg)

Farébersviller, dès septembre 1939, ressemble à un village-fantôme. La population ayant vidé les lieux, les animaux se retrouvent orphelins du jour au lendemain. Trois ou quatre cheminots et ouvriers responsables de la mine (Formery, Melling), munis de laissez-passer y séjournent quelques semaines. Des soldats concitoyens enrôlés dans les casernes de Leyviller viennent parfois aux nouvelles (les frères Lacroix, Houllé Léon). Les volets et portes claquent au vent comme les vantaux du saloon déserté par les chercheurs d’or.

Les corps-francs connaissent des escarmouches sanglantes avec les patrouilles allemandes (au cœur du village, le soldat Thouvenin perd sa jambe lors d’un affrontement à la grenade). De nombreuses divisions battent la campagne autour de Farébersviller, dont celle du Général de Lattre de Tassigny.

Le 12 mai 1940, commence l’opération Fackel (Torche) durant laquelle les Allemands cherchent à fixer les divisions françaises autour de la Ligne Maginot pour occulter la percée de Sedan. Les bombardements allemands ravagent notre région et les Farébersvillois exilés à Bonnes n’en croient pas leurs yeux lorsqu’ils découvrent à la une du journal, «La France de Bordeaux et du Sud-Ouest» le 30 mai 1940, une photo de la rue principale du village dévastée par les bombes.

La vie en Charente

Echoués dans ce petit village de Charente, voisin du département de la Dordogne, où personne ne les attend et où absolument rien n’est prévu pour leur hébergement, les Farébersvillois ont à faire face à de grandes difficultés d’organisation liées à cette transplantation (cuisine collective, emplois, école). Pourtant, ils s’organisent avec l’aide des habitants de Bonnes. Une barrière invisible les sépare : celle de la langue. Les Lorrains ne parlent pas, ou peu ou mal le français et les Charentais ne comprennent rien au dialecte qui ressemble étrangement à celui parlé par leurs ennemis germains. Des liens se créent cependant : les ménagères échangent leurs recettes de cuisine, les hommes trouvent du travail dans les fermes avoisinantes, les enfants vont à l’école. Après la lecture des journaux et les nouvelles alarmantes provenant du front de Lorraine, l’inquiétude tourne au cauchemar : c’est la défaite française et l’Armistice est conclu avec Pétain le 22 juin 1940.

L’Annexion

Le 12 mai 1940 : Le village de Farébersviller est bombardé (50-60 % de destructions). Prise de Morsbach. Ligne de front devant Farébersviller. En juin 1940 : la Moselle est envahie. Après la perte de la ligne de la Somme et la retraite des troupes françaises derrière le Seine, la situation de nos troupes sur la Ligne Maginot est désespérée. Le 7 juin : occupation de la forêt du Kneebusch à Farébersviller par la 258. Infanterie Division. Le 14 juin : c’est la bataille de la Trouée de la Sarre (mort d’Antoine Lacroix à Cappel).

Le 15 juin : A Sarrebrück, rapport de Joseph Bürckel, Gauleiter. Il présente le plan qu’il compte appliquer à la Moselle : « La tâche politique est de re-germaniser des hommes de souche allemande, mais parlant le français.» Bürckel Joseph est un nazi fanatique de la 1 ère heure qu’Hitler utilise dans les situations difficiles.

Son homme de confiance a déjà organisé en 1935 le plébiscite de la Sarre retrouvant le giron du Reich. Il a été Gauleiter de l’Autriche juste après l’Anschluss. Le samedi 22 juin, l’armistice est signé dans la forêt de Compiègne par le général Huntziger et le Generaloberst Keitel. Les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle seront incorporés dans le Reich.

L’Annexion va devenir un fait acquis, n’appelant ni discussion, ni commentaire. La Moselle est rattachée au Gau de Sarre-Palatinat qui devient alors le Gau Westmark (Marche occidentale).

 

Le village en 1941-1942 : la désolation et l’occupation

Tous les Alsaciens-Mosellans doivent rentrer suite aux clauses de l’Armistice. Le départ de Bonnes a lieu le 2 octobre 1940. Embarqués cette fois dans des wagons- voyageurs, ils sont accueillis avec faste, aux gares de tri, par le vainqueur : les poupons sont baignés, nourris au biberon ; de charmants soldats aident les vieilles dames à descendre à quai où des repas les attendent. Le Reich se veut prévenant et généreux.

Tout est fait pour séduire ! Mais c’est la mort dans l’âme que les Farébersvillois retrouvent leur village en ruines. Le bombardement de mai 40 a dévasté la localité : triste spectacle que de découvrir sa maison démolie, éventrée, sans toits, ni portes, ni fenêtres, ni meubles ! Devant l’amas de décombres, il faut recommencer à zéro et s’entraider pour pouvoir s’abriter. (cf. photos du Wiederaufbau, période de la reconstruction où l’entreprise sarroise Hasselt fit installer dans la localité des rails servant à charrier les gravats des maisons démolies).

Face au désastre, l’Allemand généreux est à nouveau là pour recoller les morceaux, leur distribuer lainages, nourriture, semences, leur procurer du bétail pour reconstituer le cheptel. Et puis, à côté de ces contrariétés matérielles, surgit une amère désillusion qui porte d’emblée atteinte au moral des villageois : à peine arrivés, ils sont obligés de signer un papier par lequel ils reconnaissent qu’ils sont Volksdeutschen, c’est-à -dire citoyens allemands.

Heimkehr (retour) dans le Reich. 1ère mesure : le recensement des biens de l’Etat, de l’Eglise, des collectivités, des Juifs. 13 juillet : la confiscation des biens des ennemis du Reich A partir du 15 juillet : libération progressive des prisonniers alsaciens-mosellans. 21 septembre 1940 : Bürckel fait son entrée dans Metz. C’est de Sarrebruck qu’il gouverne sa «Marche». Tous les postes supérieurs sont occupés par des Allemands. L’attitude du gouvernement de Vichy est ambiguë. Qu’en est-il de l’Alsace et de la Moselle ? Pour un gouvernement vaincu, il est difficile de s’opposer brutalement aux pressions de l’ennemi. Il y eut néanmoins onze protestations officielles. La plus énergique transmise par Huntziger à von Stülpnagel le 3 septembre 1940 est «une protestation solennelle contre les mesures prises, en violation de la Commission d’Armistice, à l’égard des départements alsaciens et lorrains et leurs populations et qui constituent une annexion de fait de ces territoires.» La Moselle est déclarée officiellement annexée à l’Allemagne le 30 novembre 1940. La législation allemande est introduite par étapes. Les maires mosellans cèdent la place à des Ortsgruppenleiter. Les fonctionnaires allemands remplacent aux postes-clés leurs homologues mosellans. Les tâches subalternes sont confiées à des employés qui peuvent rester sur place à condition de souscrire à la déclaration suivante : «Je reconnais le retour de ma patrie au Reich et je remplirai mes obligations de fonctionnaire et d’éducateur allemand sans réserve et avec joie. Je suis heureux de me mettre au service actif du Führer et de la grande Allemagne nationale-socialiste, dans et en dehors de mon métier.» Les professeurs doivent adhérer à la ligue nationale-socialiste pour l’enseignement, sinon c’est la destitution. Tous ceux qui refusent de signer leur adhésion au III ème Reich sont expulsés. L’épuration va toucher toute la population. Les expulsés, de par la francophilie marquée, ont droit à une seule valise et 2 000 francs (tout le reste -domaines, mobilier et bijoux- est saisi et confisqué). L’expulsion se poursuit avec l’élite religieuse. Monseigneur Heintz, évêque de Metz, est lâché dans le plus simple appareil en pleine nature. De nombreux curés sont à leur tour expulsés. A côté des colons venus d’Allemagne, les Mosellans font rapidement connaissance avec les multiples rouages des diverses organisations qui phagocytent chaque catégorie (âge, sexe) par un embrigadement habile. En haut de la pyramide trône le Gauleiter (super-préfet) qui ne reçoit d’ordre que du Führer ; il est secondé par des Kreisleiter (sous-préfets) eux-mêmes chapeautant les Ortsgruppenleiter (chef de groupe local). Puis arrivent les Zellenleiter (chefs de cellule) suivis en dernier des Blockleiter (responsables d’un bloc de pâtés de maisons). La machine à germaniser est actionnée grâce à un système tout simple : le peuple surveille le peuple ! Un système de castes avec des postes-clefs alléchants proposés aux parvenus s’arroge un pouvoir monstrueux bâti sur la peur, sur la délation, sur la répression. La lutte des classes profite aux opportunistes qui s’acoquinent au régime. La valetaille est taillable et corvéable à merci car l’Allemagne a besoin de main- d’oeuvre au moment où ses preux soldats luttent contre le Bolchevique. On endossera par la suite la camisole de force à la Jeunesse de Moselle et d’Alsace, hébétée, écrasée, meurtrie.

Le Pangermanisme à la sauce nazie :

C’est un contrôle de l’esprit et une formation de l’homme nouveau infligée comme un leitmotiv par la propagande. Dans le Lebensraum (l’espace vital), on exalte la virilité et le courage. Le slogan «Ein Volk, ein Reich, ein Führer» (un seul peuple, un seul état, un seul chef) doit être partagé sans calcul dans une communauté de sang incarnée par un chef unique et tout puissant.

Le grand nettoyage :

La propagande si chère à Goebbels martèle des idées simples : apprendre aux gens «à penser allemand». Pour cela, il faut :

1) se débarrasser des Français indociles : « Nous n’avons pas besoin d’œufs de coucou français dans notre nid propre d’hommes de langue et de sang allemands.»

2) extirper le français : « un bavardage qui porte sur les nerfs. » (cf. journée de classe).

3) l’acharnement de l’abolition du passé archaïque :

- la destruction des décorations à la française sur les façades.

- l’application dès octobre 1940 de nouveaux programmes scolaires en usage dans le Reich : des chants exaltent le devoir, l’héroïsme, la race.

- l’interdiction de sonner les cloches. Malheur au porteur de béret basque (Baskenmütze).

Le port du béret basque est puni d’une amende de 150 R.M . (3 000 F) ou carrément, la perte de travail et d’emploi est avancée, en cas de récidive. Les gifles ne manquent pas pour faire tomber cette odieuse «Gehirnverdunglungsklappe» (coiffe à obscurcir la cervelle). On discrédite la langue française : eine Rassenschande (une honte à la race) que de véhiculer un langage non maîtrisé par les Mosellans et qui plus est parlé lamentablement avec un accent horrible. La langue allemande est rendue obligatoire dès le 24 septembre 1940. On proscrit également le dialecte. Ainsi, aucun courrier écrit par les bilingues ne doit être produit en francique. Appauvri par deux siècles de présence française qui l’ont abâtardi, le platt contiendrait dit-on, trop d’idiomes et d’expressions françaises. La répression allemande est efficace. C’est l’installation de l’appareil policier nazi : la Gestapo et les hommes du S.D . (Sicherheitsdienst) s’unissent pour détecter les suspects, obtenir des aveux et des dénonciations. La Schutzpolizei (police de protection) s’occupe de régler les problèmes locaux, liés à la circulation, à la sécurité des biens et des personnes et de combattre le marché noir.

Les étapes de la germanisation :

1) L’instauration de la Muttersprache :

- Un index des nouveaux noms de communes est instauré. Farébersviller devient Pfarrebersweiler dès l’été 1940.

- La germanisation des prénoms est effective dès le 28 septembre 1940. Théophile = Gottlieb, Jacqueline = Jakobine, Huguette = Huglinde, Yvette = Irmgard.

- Le registre de l’état-civil est tenu en allemand à partir du 1 er octobre 1940. Les noms des habitants sont corrigés. Par exemple, Henry Barbe devient Hèneri Barbara. Houselstein = Huselstein, Groutsch = Grautsch, Houllé = Hulle

- L’allemand est imposé comme langue judiciaire.

- Le prêche est interdit en français à partir du 19 novembre 1940.

- L’enseignement est dispensé exclusivement en allemand (14 février 1941).

- Des affiches de propagande hostiles contre la France sont éditées.

- Le journal National-Sozialistiche Zeitung Wesmark est édité en allemand.

- L’argent : le franc français cesse d’avoir cours légal le 1 er mars 1941.

 Les slogans sont répétés comme eine alte Leier, une vieille rengaine. Erst siegen, dann reisen (d’abord vaincre, ensuite voyager). Räder rollen für den Sieg (Les roues roulent pour la Victoire). Jede schaffende Hand hälft siegen. (Chaque main laborieuse aide à la victoire). Tüchtiges Schaffen das hält auf der Dauer kein Gegner aus. (Aucun de nos adversaires n’est capable de tenir jusqu’au bout un travail soutenu). Was man nicht aufgibt, hat man nicht verloren (Schiller). (Tout ce qui n’est pas abandonné n’est pas perdu).

2) L’embrigadement dans les Organismes :

Le nazisme mobilise et demande un effort collectif.

- La Volksgemeindschaft, c’est l’unité de la Race mêlée à une communauté populaire où l’on demande à tout un chacun de faire acte d’allégeance au Reich et de jurer fidélité au Führer.

- L’adhésion au parti N.S.D .A .P . qui est le parti national-socialiste des travailleurs allemands

- L’adhésion au N.S.V . représente la ligue nationale socialiste pour le bien-être du peuple chargée d’organiser les secours d’hiver (Wintershilfe) et les services de secours (Hilfsdienst).

- La Hitlerjugend accueille des jeunes hommes de 14 à 18 ans dont le but consiste à former des corps endurants et des esprits disciplinés, totalement dévoués.

- La deutsche Frauenwerk est une organisation de masse pour les femmes qui doivent s’acquitter de leurs devoirs de mères conformément aux doctrines nazies de la trilogie : Kinder, Kirche, Küche, enfants, église, cuisine.

- La N.S.S.K . (sorte d’automobile club).

- Beaucoup de nos compatriotes sont encouragés à entrer dans les sections d’assaut (S.A .) et les échelons de sécurité (S.S.) . Si l’on veut éviter l’expulsion, on doit adhérer solennellement à l’Allemagne nationale-socialiste. La jeunesse est chargée de collecter des os, des déchets de papier, du textile, des plantes, des vieux métaux et de chasser les doryphores.

3) Les sanctions :

La vaste opération de colonisation précédée de brutales expulsions préfigure des lendemains lourds de conséquences. La famille qui refuse de signer une déclaration d’appartenance à la grande nation allemande et de loyalisme envers le III ème Reich est déportée. Les temps sont révolus où l’on pouvait s’exclure du travail pour vivre à la française. L’occupant, après toute cette mise au pas, considère qu’il se trouve en présence d’une population plus docile. Son souhait est d’utiliser l’appareil d’Etat (administratif, juridique, politique) du pays en s’adjugeant une population malléable sur le terrain. Quelques-uns jouent la carte allemande par calcul, mais surtout par crainte de perdre leur profession ou par peur de finir à Dachau (pressions suggestives). La collaboration est peu acceptée cependant. Seuls quelques volontaires imprégnés de culture allemande et qui avaient nourri à un quelconque moment des griefs contre la France se laissent embobiner.

C’étaient très souvent des ouvriers qui pensaient, grâce à la victoire allemande, prendre une revanche sociale. Les S.A . locaux, bien rares, exercent des pressions sur leurs compatriotes par des menaces de pertes d’emploi, par des pressions insidieuses sur ceux qui ne font pas partie d’associations nazies. « Si l’on n’obtempère pas, la douche écossaise surviendra avec d’abord la perquisition intimidante puis la déportation », disent-ils. L’occupant se fait aider par ces auxiliaires du cru qui connaissent les lieux et les habitudes. Mais parmi eux, certains Parteigenossen tirèrent plus d’une fois du mauvais pas maints gaffeurs ! Issus de nos villages, ils usèrent certes de sympathie envers le III ème Reich, mais il fallait à la limite les préférer, eux, plutôt que d’être confrontés à d’illustres inconnus venus de l’Allemagne profonde chargés d’inculquer la messe nazie ! En tous les cas, la plupart se comportèrent d’une manière plus humaine. Ils étaient sensibles à la détresse de l’époque. Malgré tout ce conditionnement, la population ne devient guère réceptive à l’idéologie.

Sous l’occupation

Les journaux sont écrits en allemand. L’usage du français est interdit, même en privé. La commune fusionne avec Seingbouse et Théding (mairie installée d’autorité au presbytère de Farébersviller). Le monument aux morts est modifié : on enlève les plaques «Morts pour la France». Le Mark se substitue au Franc. Le clergé « se range» ; la moitié des curés est expulsée (cf. récit de l’Abbé Thiry). Dès fin août 1942 jusqu’à novembre 1944, 30 000 Mosellans Malgré-Nous vont être incorporés de force dans l’armée allemande. Le Code Civil allemand est promulgué en janvier 1943. On fait la chasse à Jeanne d’Arc qui a sa statue dans l’église. Le curé et ses ouailles ne peuvent rien contre l’enlèvement des cloches (19 juin 1943).

Le chef des Siedler s’appelle : Oberscharführer Blass Franz. Les nouveaux «Lothringer Arbeiter» installés d’office à Pfarrebersweiler comportent les familles Scheller, Wittal Ludwig, Bessai Otto, Bessai Guimpro, Engel Johan. Ces colons allemands (Siedler) souvent méprisants s’installent dans les maisons laissées «vides» par les déportés partis dans les Sudètes.

Ce sont des sympathisants qui affichent un loyalisme déférent au régime bienfaiteur. Parfois arrivent des Flugbeschädigten (civils victimes de bombardements) heureux d’être logés à bon compte. Ces colons se partagent le ban communal en un remembrement arbitraire. Forts de leurs droits, ils prennent la part du lion et s’arrogent les meilleurs champs au sol arable (Witzboden), les larges prairies étales du ban, les parcs à bestiaux déjà aménagés. La ferme Groutsch ne trouve pas de preneur, sans doute à cause de la forte déclivité sur les versants.

Des chevaux sont carrément prélevés par ces nouveaux Bauern dans le cheptel local. L’assolement imposé défavorise les paysans autochtones qui se voient attribuer des lots de terre morcelés, ou perdus en périphérie du ban. Les petits cultivateurs ne sont pas les plus à plaindre : une petite économie de marché leur permet avec le surplus (lait, lard, cochonnailles...) de s’approvisionner en produits vestimentaires : le chausseur O... de l’Hôpital troque des chaussures contre de la poitrine fumée.

Gare au marchand surpris par cette pratique ! Le braconnage reprend. Le gibier prolifère mais également les renards. Deux goupils pris au collet seront ainsi dépouillés pour devenir d’estimables cols de fourrure (témoin Nicolas H.)

La guerre est toujours une période difficile pour tous. Elle joue à la fois sur la santé mentale et physique de l’individu et altère l’atmosphère bénie des lendemains de paix que les Mosellans depuis la funeste guerre de Trente Ans souhaitent interminables.

Rationnement et système D : Il n’y a pas assez de nourriture pour les habitants, pas assez de charbon pour le chauffage, de tissu pour les habits ou de cuir pour les chaussures. Et puis il n’y a pas ci, et puis il n’y a pas ça. C’est la diète imposée pour couvrir les monstrueux besoins de la machine de guerre insatiable. Cette mise en place du rationnement indispose tout le monde mais le Rundfunk (radio) dans les mains du docteur Goebbels justifie cette démarche de sacrifices pour permettre à la glorieuse Allemagne de pourfendre les ennemis du Reich et ainsi pouvoir instaurer son régime millénaire. Les habitants disposeront donc de tickets qui leur ouvrent droit à une panoplie de produits, répertoriés ou variables suivant l’âge ou les circonstances. Philatélistes sans le savoir, nos villageois vont se débarrasser de leurs «timbres-provisions sur papier» chez l’épicière Thérèse Schmitt en échange de pain, d’huile ... und so weiter.

Les tickets ne suffisent pas. Alors au lieu de se serrer inutilement la ceinture, imagine-t -on des manières originales pour compenser le vide. Même si l’autoconsommation doit se suffire de la frugalité imposée, l’appétit creuse et ne se nourrit pas d’illusions. Passe encore pour les ersatz, ces produits de substitution qui ont, en ces périodes de disette, l’avantage de ne pas faire crier la faim au cœur du ventre de l’homme ! Comme tous les débrouillards, on va donc suivre un régime calorifique parallèle mais décrété hautement répréhensible pour ces adversaires du régime nazi dédaignant en ces temps difficiles le pain noir Pumbernickel. Pour bien manger en cachette, il faut chercher de la nourriture au «noir». Il existe donc un marché souterrain, appelé communément marché noir, Schwarzmarkt. Les Schmuggler sont ceux qui le pratiquent intelligemment. La nourriture devint une obsession. Les gens des Kolonies de la mine venaient hamstern, c’est-à -dire s’approvisionner en ravitaillement auprès des paysans. Le hamster est connu pour planquer dans ses bajoues la nourriture superflue ou la cacher et la stocker dans des réserves. Les particuliers ont, par un jeu de mots tiré du bestiaire animal, transféré cette qualité de magasinier à nos villageois. Ces derniers étaient bien embêtés lorsque des inconnus venaient rechercher em Gau (au terroir, en fait dans les villages du plateau) des denrées comme le beurre, le lait ou le lard. Et si c’était la Gestapo ? (cas signalé par Mme Simone Dilinger). Aussi, se procurer de telles victuailles n’était pas chose aisée : - o u bien les vaches étaient vides comme des lanternes (leer wie eine Lantern’) à cause du maigre fourrage et de ce fait ne dépassaient plus et de loin les quotas lactés dignes d’un bovidé, - o u bien on se confondait en excuses (nourrir de la parenté, préparer la communion, allaiter les enfants, etc...) . Pour faire vivre die unersätliche Kriegswirtschaft (économie de guerre insatiable) le peuple, tout en se saignant aux quatre veines, mange à la spartiate.

Cartes d’alimentation (Lebensmittelkarte) générale concernant les denrées suivantes : viande, farine, pain, sucre, confiture. Lait : 1⁄2 litre lait entier (enfants jusqu’à 6 ans), 1⁄4 litre (de 6 à 14 ans), 1⁄4 litre écrémé (+ 14 ans).

Distribution périodique : Sonderausgabe (distribution exceptionnelle) : riz, fécule, café (150g). Distribution particulière aux mineurs (Saargruben AG) : farine, pain, viande, saindoux, 1 vélo avec 2 chambres à air (pour les mineurs habitant loin du siège). Bezugscheinen (dotation) : 1 paire de chaussures par an (type AB, cuir), 1 paire de sandalettes en été (type B, semelle en bois), étoffe par points (4 points ouvrant droit à du tissu pour confectionner 1 chemise), tabac : 2 cigarettes-jour, Essigessenz (vinaigre), saccharine à fadeur sucrée et à l’arrière-goût amer, Kunsthonig (miel artificiel), Pfeifer &Diller Kaffee Essenz (chicorée au relent de café). Boissons régulières, Süsswein (vin doux), Bière, Schnaps (Renseignements fournis par M. Garnier† de Cappel.) Comment fabriquer le savon ? Chauffer le suif (Rindsfett), ajouter du Seifenstein (poudre émeri), mélanger avec du silicate de soude (Wasserglass). En refroidissant le mélange figeait. Il suffisait de le découper en cubes qui ressemblaient alors beaucoup à des savons de Marseille, mais la comparaison s’arrête là ! Comment obtenir de la farine et autres denrées ?

Les gens sont de géniaux bricoleurs par temps de guerre. On s’était aperçu qu’en écrasant le blé à l’aide d’un disque d’acier frottant sur un disque fixe, le son obtenu virait à la teinte grisâtre. Il suffisait de remplacer le dispositif par des meules en granit qui dégorgeaient alors un son de très bonne texture. Un tamis fait de soie laissait filer une farine fine et appréciée. On vilipende les profiteurs en les fustigeant publiquement par des campagnes d’opinion. L’affiche Kohlenklau (vol de charbon) tempère les ardeurs et culpabilise les chapardeurs. Cause toujours ! Les Allemands opérèrent sur les ressources alimentaires des prélèvements massifs. Le Reich allait exiger un tribut grandissant en matières premières, surtout celles concernant la livraison de productions agricoles. Les fermiers devaient donner les œufs non par douzaines, mais d’après leur poids.

On comprend aisément pourquoi ; ce sont les petits œufs qui auraient fini dans la casserole alimentaire du Reich, les fermiers gardant les plus gros pour leur consommation personnelle. Pour huit poules pondeuses qui alimentaient en œufs une famille de six personnes, il n’y avait pas à les rapporter en mairie pour les besoins de l’Etat.

Mais au-delà du nombre imparti de poules répertoriées dans la basse-cour, leurs œufs étaient ramenés à la coquetière municipale. « Près du hangar (Feldscheuer) installé sur la place du village remblayée par les pierres de démolition (provenant des maisons bombardées en mai 1940), se trouve l’aire de battage. Elle accueille la moissonneuse à vapeur. Une partie de la récolte part dans le grenier-gosier du Reich, car, plaisante-t-on amer, il faut travailler pour le roi de Prusse : «ce que tu as produit et obtenu après des tonnes d’effort, tu n’as pas le droit d’en disposer !» Alors, avec le peu de céréales qui peut être subtilement volé sur sa propre récolte, on s’arrange pour le proposer au boulanger Karmann de Théding contre du pain blanc, ou bien l’on va en train à Oermingen, au moulin Jacob, pour y faire moudre son blé, mais il y avait une telle foule que la nuit y passait avant d’obtenir son dû. En effet, les nombreux cultivateurs de la région qui avaient hérité d’une Mahlkarte, carte pour moudre leur Zentner (demi-quintal) en farine de blé (Weizenmehl), faisaient le pied de grue devant les meules. Cette patience avait un juste prix : plus d’un paysan avec l’aide du meunier put ainsi escamoter davantage de farine que celle concédée à la mouture octroyée » signale Jean Wilmouth de Freyming. Le Fleischbeschauer (contrôleur de viande) venait vérifier l’état de la viande et délivrait un satisfecit.

Pour une bête de 100 kg, il calculait 60 % de viande et abats récupérables et diminuait d’autant les tickets de viande au propriétaire, lequel préférait souvent livrer la moitié de la bête quitte à récupérer à travers les tickets une variété de produits de salaison ou bien de la viande obtenue à date fixe plutôt que d’avoir tout à consommer en même temps. L’abattage d’un cochon était strictement contrôlé. La viande acquise enlevait automatiquement les cartes- distributions de viande. Pour élever un cochon au noir et le soustraire à la comptabilité intraitable du Fleisch- beschauer, il fallait user d’artifices comme savaient le faire nos madrés cultivateurs. Pour ramener un cochon découpé, Nicolas Houllé le cacha sous une charretée de bois qu’il était allé livrer à sa fille Irma de Théding. Les lapins n’étaient pas répertoriés. On pouvait à la fois utiliser leurs robes touffues et leurs corps délectables. Le sort des veaux jumeaux était connu à l’avance et l’un d’eux finissait obligatoirement sa vie dans l’arrière-cour de la maison. Malheur à la perquisition souvent provoquée par des dénonciateurs anonymes. L’élevage des poules et des lapins permettait d’améliorer l’ordinaire sans compter les produits du jardin qui eux, fournissaient des potées mémorables.

Dans les plates-bandes poireautaient le légendaire rutabaga, le chou-rave (Kohlrave) et les choux frisés si prisés. La soupe d’orge perlée (Graupensuppe) remplissait les écuelles. Le café était devenu une denrée bien rare et introuvable. Les accrochés de la «cerise torréfiée» la remplaçaient par d’autres moutures faites de glands séchés bien amers et brûlés dans les fours, ou d’orge étalée dans les moules à tarte et qui brunissait sous la chaleur induite du poêle.

On s’habillait à l’économie. Un manteau se rafraîchissait au Kaffee noir ; un habit se recousait. Les chaussures réparées arboraient quelquefois des semelles faites de bandages de pneus. Les sabots renaissaient. Avec les bandes transporteuses, on fabriquait des «nus-pieds». Les tuyaux d’air comprimé servaient de pneus aux vélos. La circonférence calculée au plus juste, s’adaptait sur le cercle métallique de la roue. Le boudin était relié par un raccord métallique que l’on pouvait resserrer grâce à une vis installée à la place de la valve. Lors d’un trajet, le raccord, ramené par chaque tour de roue sur le corps de la chaussée, laissait entendre le tagada à répétitions. « Les fruits exotiques et méditerranéens (bananes, oranges, citrons) avaient disparu des étals des primeurs. Le chocolat avait une consistance terreuse. A la différence des gens des colonies (cités minières) souvent sans ressources alimentaires, les villageois étaient gratifiés du titre de Selbstversorger (auto-consommateurs) mais perdaient alors le bénéfice de cartes de rationnement du type beurre, farine ou lait. Mes tantes avaient déniché de la grosse laine et nous firent des «chaussures» tricotées sur lesquelles elles cousirent une semelle de caoutchouc.

Les chaussures dont le cuir craquelait étaient rafistolées avec des rustines récupérées sur les languettes d’anciennes chaussures. La plupart des semelles étaient renforcées avec des clous à brodequins et des embouts de fer aux talons. Quel plaisir de glisser sur le verglas ! Le patinage avant l’heure ! Quant au tabac, chacun se débrouillait pour récupérer des graines et piquer les plants entre les betteraves ou tout simplement au jardin. Il y avait le tabac aux feuilles pointues qui dégageait une nicotine légère ; les feuilles rondes, par contre, asphyxiaient le fumeur. A l’heure de la récolte, il fallait traiter les feuilles, les enfiler et les étendre au grenier pour y être séchées. Certains les faisaient fermenter dans le regain. De nuit ou de bon matin, on passait chez le voisin spécialiste pour «saucissonner» en fines lamelles l’herbe (à nigauds) ; la fumée incommodait au point que les mouches tombaient du plafond ! » relate M. Garnier.

Campagnes et collectes :

- collecte et ramassage de plantes (Huflatig, tussilage) pour décoctions et tisanes,

- ramassage des tracts lancés par les avions anglais,

- tricotage de gants pour l’opération Winterhilfswerke,

- plantation de betteraves.

L’obsession du ravitaillement ajoutée à la pénurie sans cesse grandissante des produits de 1 ère nécessité plongèrent plus d’un de nos concitoyens dans un désarroi bien profond. Les problèmes de la vie quotidienne devenue si contraignante avec les interdits mis en place, détournaient encore davantage les autochtones des autorités allemandes. Une opinion négative s’installa progressivement. Des citadins et des mineurs se retrouvèrent mitraillés dans les trains qui les ramenaient de la campagne vers les sièges d’extraction de Merlebach. Un jeune d’origine polonaise de la cité Jeanne d’Arc succomba à ses blessures dues aux tirs d’un chasseur U.S. dans le wagon éventré stoppé entre Cocheren et Farébersviller (septembre 1944).

Surmonter ses peurs

Aucune lumière ne devait filtrer vers l’extérieur ; les bombardements anglo-saxons empêchaient le bon Mayer- Goering de dormir. Les fenêtres calfeutrées et le double tour donné sur la clef de la porte d’entrée permettaient d’écouter le Schwarzsender : « Radio Bip ! Bip ! Hier Radio London » (c’était une émission très brouillée). La vérification des papiers dans les gares ou dans la ville était monnaie courante. Par ailleurs la France n’est pas morte. Les gens de Farébersviller qui sentent s’appesantir sur eux la chape de plomb de la National Socialistiche Propaganda gardent l’intime conviction que les Allemands apparemment invincibles vont s’enferrer dans la nasse russe. Tôt ou tard raisonnent-ils, le rapport des forces alliées va basculer en leur faveur. La radio contrôlée annonçait en cet interminable automne 1942 : « Stalingrad wird fallen ».

A chaque bulletin de victoire dans les faubourgs de la ville si chère à Joseph (Iossif) Vissarionovitch Djougachvili dit Staline, les drapeaux nazis claquent au vent à Farébersviller. L’encerclement de l’armée de Paulus a chez les villageois un retentissement qu’ils se gardent bien d’extérioriser. La reddition sonne comme un glas. Par ailleurs, dans le village, les gens se débrouillent pour surmonter le froid de l’hiver : fagots, fascines de bois collectées dans les haies sont utilisés pour chauffer la maison.

La bonne farine blanche se faisant rare, on inventa avant l’heure le pain aux multiples graminées et céréales. Le tabac, n’en parlons pas. Les fumeurs invétérés imaginèrent recréer un monopole à partir des feuilles roulées des betteraves et enfouies dans le regain de la 3 ème tonte, la dritt’ Schor. Les bouffées perfides arrachent des toux significatives. Si les difficultés du vécu concret restent toujours un souci majeur, les évènements extérieurs passent désormais au premier plan grâce à la radio clandestine qui informe l’opinion publique sur l’invasion de la Sicile et la chute de Mussolini.

«Résistance» passive

1) Les bons mots ne manquent pas :

• «Maman, viens voir, le Führer défile à Farébersviller». L’alerte octogénaire myope comme une taupe distingue vaguement un défilé des Goldfasanen (les faisans dorés) descendant la rue. Elle lui trouve, aux dires de Jules, un air très pantouflard malgré sa «hoche Schippekap» (haute casquette-pelle).

• Comment préparer une corne ? La mettre au four avec un burin. Si le burin s’attendrit, la corne est bonne !

2) Les facéties

• Dans un café où s’installe un fort-en-gueule nazi, un courageux Lorrain s’exprime en vers : «Nur nicht so laut Hier wird noch gebaut und wo der Storch sein Nest baut, da ist man nicht so laut. Tout doux, tout doux, Ici l’on construit (l’avenir), et là où la cigogne érige (depuis toujours) son nid, on ne souffle mot.»

• La peau de lapin et les escargots. L’affaire du Steinbock (Cf. témoignage de Camille Melling).

3) L’aide aux Russes à Pfarrebersweiler. De nombreux prisonniers s’échappent et errent dans la nature.

a) aide des villageois qui apportent de la nourriture : derrière la forêt du Studen (deux prisonniers russes qui grillent des baies d’aubépine), dans le Kneebusch, dans le Kirschgarten (arrêté, le malheureux va devoir travailler toute la journée sur la place du village avant d’être fusillé à hauteur du cimetière, son corps sera chargé sur une brouette).

b) fuite d’un captif s’évadant hors de la colonne qui descend dans la rue des Moulins en s’engouffrant dans la cave d’Egloff Eugène.

c) Prestation de services. Les Russes se chargent de menus travaux dans les champs contre de la nourriture. Ce sont aussi d’habiles artisans qui transforment les douilles d’obus de laiton en de beaux vases ornés. Des rafles et des battues sont organisées pour les retrouver.

d) Résistance : Hackenberger Pierre fusillé à Farébersviller, les frères Lagrange déportés à Dachau.

Le village, en 1943 : la répression

La Wehrmacht essuie ses premiers revers, sur terre, sur mer et dans les airs. Alors cette formidable machine de guerre commence à se gripper. Les conséquences pour les villageois sont plus dures : grâce au zèle du Kreisleiter Hahn de Saint-Avold, ceux qui ne veulent pas coopérer sont déportés par familles entières vers les camps spéciaux de Silésie et des Sudètes (18 janvier 1943). Ainsi, sur 123 familles, 43 sont déportées, 4 villageois y sont morts. Ils hériteront après guerre du qualitatif de P.R.O . (Patriotes résistant à l’Occupation). Un désarroi profond s’installe alors avec le renforcement de la répression, le cycle noir des arrestations et l’aggravation des pénuries. Le contrôle est renforcé, les réquisitions et perquisitions sont fréquentes. Les jeunes sont obligés de porter l’uniforme allemand sinon c’est la répression pour leur famille, ils doivent se sacrifier et se battre pour une cause qui n’est pas la leur. On leur donne le nom de «Malgré-Nous».

La bataille de Farébersviller du 28 novembre au 4 décembre d’après M. René Caboz, Historien.

« C’est la débâcle allemande sur tous les fronts d’Europe et même en Afrique. Les victoires du début sont remplacées par des défaites sanglantes. Dans le village, hommes et bêtes sont réquisitionnés. Ce n’est pas encore la famine, mais en ville, des queues se forment devant les magasins. On parle à haute voix de la propagande nazie et des rumeurs circulent à propos des camps de concentration (K.Z).

On se met à espérer que la fin du régime est proche. Le 6 juin 1944, le monde entier a les yeux fixés sur la Normandie, où les troupes alliées débarquent. Leur avance est momentanément stoppée par la résistance des dernières forces allemandes qui se battent avec obstination et désespoir. On retrouvera la 17ème SS Panzer Grenadier Division cinq mois plus tard à Farébersviller. Grâce aux forces alliées soutenues par l’aviation omniprésente et une armada blindée, l’Ouest de la France est libéré, puis Paris, le 25 août. La route vers l’Est est ouverte.

Le 18 novembre les combats pour la libération de Metz s’engagent. Le 20 novembre, Faulquemont est libéré par la 80 ème DI U.S. qui y fait 600 prisonniers dans la journée. Le 27 novembre, Saint-Avold est libéré sans combat et le colonel Lewis poursuit vers le Nord pour fermer la route à la retraite allemande se dirigeant vers Sarreguemines. Après un bref engagement, Seingbouse est enlevé. Le 3 ème bataillon du 317ème CT abandonne ses véhicules, poursuit à pied sur la route de Farébersviller. Ce régiment d’infanterie est chargé de reconnaître les positions tenues par l’ennemi.

Le 28 novembre 1944

Déployé en ligne, le 3 ème bataillon du 317ème Combat Team du colonel Lewis est surpris par les feux ennemis en arrivant à la lisière Ouest de Farébersviller. Il vient de buter sur une forte compagnie d’environ deux cents hommes du 38 ème régiment de Panzer Grenadier de la 17ème S.S. Panzer Division, dernière unité du ХШ ème S.S. Korps qui vient d’abandonner Saint-Avold et qui couvre la retraite sur l’axe Farébersviller-Sarreguemines. Le combat s’engage et maison après maison, l’ennemi est repoussé vers l’Est. Le soir, le 3 ème bataillon est maître du village. Le colonel Lewis décide de poursuivre sa marche vers l’est, espérant enfin prendre le contact avec la 320ème CT de la 35ème DI U.S. voisine qui est signalée attaquant sur l’axe Rémering-Puttelange-Loupershouse.

Ne laissant sur place qu’une section de sécurité, le 3 ème bataillon sort de Farébersviller et prend la route vers l’est. Le 317ème CT tombe dans un piège. La configuration du terrain fait que la gare de Farébersviller, transit ferroviaire servant aux mines de charbon de la région, est complètement isolée et plantée à flanc de coteau. Le bataillon de reconnaissance de la 17ème S.S. PGD et le 38 ème régiment après avoir abandonné Saint-Avold, se devaient d’enlever le secteur de Farébersviller afin de pouvoir couvrir la retraite allemande vers le Sarre.

Le 317ème CT très vite désorganisé est obligé de se retrancher dans le village. Accompagné de blindés, un important bataillon de PGD, provenant de la 17ème S.S. PGD qui s’est retirée de Metz, et qui a été complétée par d’autres bataillons composés de Cosaques, de Mongols et d’Ukrainiens ne faisant pas de quartier attaque le 3 ème bataillon. Les combats de rue d’une férocité inouïe vont durer toute la nuit. Les Allemands triomphent. Ils prennent «eine reiche Beute» (un riche butin de 40 véhicules), éliminent 7 tanks Sherman et font 192 prisonniers.

Le 29 novembre 1944

Le matin, les compagnies du 3 ème bataillon, après une résistance désespérée, n’ont plus que des effectifs allant de 60 à 32 hommes. Refoulées vers la lisière Ouest du village, elles n’ont pu être ravitaillées et sont sans munitions, il y a de nombreux blessés. Les survivants se sont retranchés à 1 000 mètres à l’Ouest du village. Les Allemands font des patrouilles dans le village mais leur ligne de front principal passe le long de la voie ferrée. Il s’appuie sur la ferme Bruskir et les collines 316 et 326 (Winterberg et Schallberg)

Nuit du 29 au 30 novembre 1944

Le 318e CT reçoit l’ordre de relever le 317e CT, le front est stable. Des escarmouches ont lieu sur le Winterberg.

Du 1er au 3 décembre 1944

Simple patrouille US et tirs d’artillerie US. Le général Patton donne des ordres : en vue de soutenir l’attaque sur Sarreguemines, le ХП ème Corps du général Eddy attaquera le 4 décembre le secteur Puttelange-Farébersviller. Les Américains amènent des renforts. Un avion de reconnaissance surveille le théâtre des opérations.

Le 4 décembre 1944 : (cf. La bataille de Farébersviller, livre disponible en mairie)

Après une sévère préparation d’artillerie, le 318ème CT précédé du 42 ème Squadron de cavalerie de reconnaissance, libère à 9 heures Farébersviller (photo d’un Sturmgeschütz prise juste après-guerre, les tankistes carbonisés ayant été retirés auparavant par le service des sépultures).

 


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