« Le20 octobre 1942, j’ai été appelé chez les Gebirgsjäger (unité à comparer aux chasseurs-alpins) puis dans l’infanterie avec une instruction menée en Allemagne. En janvier 1943, ce fut la montée au front, avec, au préalable, la chasse aux partisans dans le secteur de Moguilev-Vorochilovgrad. J’étais considéré comme un étranger, étant le seul Alsacien dans ma compagnie, une condition insupportable !

Mes derniers combats eurent lieu sur l’axe Kirovograd-Tiraspol-Kichinev.

Sans rupture, sans temps mort, les bombardements de la Stalinorgel (orgues-de-Staline) pleuvaient sur les lignes d’infanterie. Un jour, notre section d’infanterie fut prise dans l’éboulement d’un abri hors duquel j’ai pu me libérer avec l’aide d’un camarade tandis que les autres occupants périssaient sous les masses de terre (région de Kiew-Zitomir). J’ai pris par la suite des éclats d’obus dans la face postérieure de la cuisse gauche.

J’ai encaissé de rudes traumatismes psychiques : le plus terrible fut celui que j’ai vécu durant les encerclages dont j’ai connu sept fois le drame, c’est-à-dire, une tactique spéciale menée en forme de pince à tenailles par des Russes survoltés dans la région où je me trouvais entre Kirovograd et Tiraspol, avec des courses folles dans nos fuites éperdues : je ne savais plus de quel côté courir pour échapper à leur bestiale sauvagerie.

Encerclé et poussé dans les marécages, je fus capturé le 27 juillet 1944 dans les environs de Tiraspol-Kischinew. J’ai subi des interrogatoires sévères. Les marches forcées se faisaient du lever du jour à la tombée de la nuit, sans chaussures ni vivres et ainsi de suite durant six jours jusqu’à l’embarcadère du chemin de fer. Pour les épuisés, les postes russes ne faisaient pas long feu, c’était le coup de grâce qu’on appliquait aux diminués.

Tambow : services éreintants en forêt et au kolkhoze, une punition de 6 jours corvée de latrines par suite de la non salutation envers un officier russe (cette corvée a été les plus dure dans ma vie).

L’hiver fut l’événement le plus éprouvant : manque de nourriture et d’eau à boire, mauvaises conditions de nutrition et d’hygiène, absence de chaussures et de vêtements convenables, corvée de bois quotidienne jusqu’à épuisement. J’ai vu des camarades dysentériques (la maladie du camp) s’écrouler morts, en revenant des latrines ; c’était des épreuves difficiles pour moi, car des scènes pareilles faisaient penser à quel point la mort était proche pour soi-même.

Cauchemars postérieurs : réveil en sueur, angoisse de ne pas percevoir ma portion de pain lors de la distribution à Tambow. Je n’aime pas parler de la guerre et de ma captivité à d’autres personnes, surtout à notre Jeunesse, par crainte de ne pas être écouté. Le Russe restera toujours dans ma mémoire comme un individu non civilisé. Prisonnier durant 15 mois, je fus rapatrié en France le 24 octobre 1945 (aveugle la nuit, oedèmes et perte de dents). Mon frère est tombé en Russie. » Bentz Jean, né le 11. 06. 1922


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