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Fischer Martin

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« J’ai assisté à l’anéantissement d’une grande partie de la ville de Koenigsberg, provoqué par les incessantes attaques aériennes de l’aviation rouge. J’ai dû aider à déterrer des décombres les survivants, mais hélas aussi, les mutilés, les morts, les brûlés.

Vers la mi-janvier 1945, notre ligne de front allait subir d’intenses bombardements émanant de tous les calibres possibles de l’ennemi. Nous avions pu forcer le passage de la Rominder Heide, une lande forestière près de Koenigsberg, pour nous extraire du guêpier. Après la reconstitution d’unités nouvelles avec les restants éclatés des troupes décimées, nous avons dû aller reconquérir une partie du terrain perdu, pour constater, hélas, que les civils qui n’avaient pu fuir avec nous, avaient été massacrés, charcutés et horriblement mutilés.

J’ai été fait prisonnier en tant que Funkmelder le vendredi 2 février 1945, au cours d’un combat ; je ne sais plus précisément dans quel coin de Prusse-Orientale cette capture s’est déroulée. Je reçus des coups de bâton qui réduisirent en miettes le poste-radio que je portais sur le dos. Une bosse qui pointe encore aujourd’hui ses protubérances sur l’épaule droite témoigne de la violence des coups reçus. Le lendemain matin, je subissais des interrogatoires musclés. A côté de moi mourut, suite à une sévère bastonnade, mon aide-opérateur qui m’était associé au poste de transmission.

J’ai poursuivi ma route d’infortune quatre jours durant, et c’est seulement le mardi suivant que j’ai enfin obtenu ma première gorgée d’eau, la langue bien pendante depuis le fameux vendredi de ma capture !

Quelques jours après, un officier russe, après avoir choisi au hasard trois prisonniers au milieu du groupe dont je faisais partie, nous ordonna de prendre des pelles, de creuser notre fosse. Il nous fit nous agenouiller à l’extrême bord, la tête dans le trou et les mains derrière le dos. Il tira son pistolet et me pressa le canon froid dans la nuque. Le coup ne partit pas, mais un certain effet chair-de-poule en resta, croyez-moi !

Si un prisonnier tentait d’aller chercher un peu de neige fraîche, en sortant des rangs, histoire de se rafraîchir la bouche, il était abattu sans sommation.

Dans le camp de ramassage et de passage de Georgenburg, à chaque nouvelle arrivée de troupes de prisonniers, on triait les captifs à la recherche de spécialistes en tous genres. Ma profession de cordonnier me valut de faire partie des 280 à 300 ressemeleurs-bottiers (leur nombre fluctuant dépendait des morts ou des malades survenus dans nos rangs) pour réparer les bottes de feutre de l’armée russe. Malheur au cordonnier qui était surpris à échanger ses godillots pourris aux pieds avec une paire de chaussures russes à réparer ! Il avait droit à être enterré vivant, nous avait-on menacés.

Suite à l’effondrement des latrines, une partie des prisonniers s’y noya. Victime de nombreuses crampes dans les jambes et dans les mains, j’ai surtout souffert de spasmes d’estomac, et en dernier lieu, de la dysenterie qui faillit m’être fatale. J’ai également enduré les inconvénients d’une pénible cystite suite à mes nombreuses nuits collées au sol gelé. J’ai été libéré en septembre 1945. »Fischer Martin, né en 1926 


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