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«….. Le 3 septembre 1944, nous arrivâmes à Ubliwskaja. Notre camp était situé à 4 km de la gare partiellement détruite. Le terrain sablonneux rendait la marche pénible. Des guérites annoncèrent enfin la présence du camp.

De vieux poulaillers attendant d’être transformés en dortoirs nous y attendaient. Le camp entouré de barbelés était bien gardé. Chaque prisonnier fut soumis au bain, à la désinfection et à une fouille minutieuse.

Nos occupations étaient variées et souvent très pénibles :

- glaner les épis de millet (un sac de jute pour deux hommes agenouillés pendant 6 à 8 heures par jour),

- arracher les mauvaises herbes pour aménager dans le camp une surface nette et plane en terrain sablonneux,

- porter des poutres ou des troncs d’arbre, des rouleaux de fil de fer barbelé de la gare au camp,

- découper des troncs d’arbres en planches. Le tronc était posé sur un genre d’estrade dont le plancher avait un  espace en son milieu. Deux prisonniers, l’un sur l’estrade, l’autre en-dessous devaient à tour de rôle tirer la scie vers le haut et respectivement vers le bas (dessin reproduit plus loin, dans le chapitre Survivre à Tambow).

- aménager les fameux poulaillers en logis. A cet effet, il fallait gratter la fiente dont la couche avait bien 10 cm d’épaisseur. Les crottoirs nouvellement nettoyés étaient destinés à de futurs prisonniers. Je peux affirmer que ce fumier de poule formait un tas de plus de 10 mètres cubes.

Un beau matin, il y eut contre-ordre. Il fallut tout démonter, enrouler le fil de fer barbelé, récupérer les poteaux et porter les matériaux à la gare distante de 4 km.

Le 6 octobre, nous quittâmes ce camp de malheur. Après de nombreux appels et des fouilles minutieuses, la colonne de prisonniers se dirigea vers la gare. Le transport en wagons-à-bestiaux allait durer trois jours.

Aux arrêts, en rase campagne, on avait l’autorisation de sortir un peu, tout en restant à proximité du wagon. La nourriture était minable et la nuit, on souffrait du froid.

A notre arrivée au camp n° 50 de Frolow, situé à 120 km environ au nord-ouest de Stalingrad, il restait, à la suite de la reddition de Paulus le 31 janvier 1943, environ 1 200 rescapés sur les 6 000 prisonniers qui avaient été dirigés à pieds sur ce camp dans la neige et le froid. Les structures du camp n’avaient pas été conçues pour accueillir ces hommes déjà très affaiblis. Une soupe chaude toutes les 48 heures (c’est un grand mot) par un froid intense ne permettait pas de survivre. (Rappelons que sur les 90 000 survivants de la VIème Armée allemande lors de sa capitulation, moins de 6 000 restèrent en vie). Après notre arrivée au camp, désinfection et toilette avec distribution d’effets propres puis une quarantaine étalée sur une période de 21 jours s’y succédèrent.

 

La nourriture journalière portait sur trois soupes, du thé et 600 g de pain noir. Une pétition signée par 94 Alsaciens, Lorrains et Luxembourgeois, fut adressée au Maréchal Staline. Fin octobre, réunion de tous les Français. Le commandant du camp nous parla d’un prochain départ…. » Frey René


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