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« 10 octobre 1944, départ pour la Silésie et rapide formation dans un régiment d’infanterie.

Après être monté au front, j’éprouvais une peur panique à chaque attaque aérienne des bombardiers russes, mais aussi face aux marmitages mortels des orgues-de-Staline.

J’ai été fait prisonnier le 27 avril 1945 à Beeskow, près de Francfort-sur-L’Oder.

Pendant la marche forcée vers un camp, je fus témoin du meurtre de l’un de mes camarades. Celui-ci, en dépit des ordres reçus, sortit des rangs pour aller se désaltérer dans la flaque d’un fossé. Une sentinelle lui tira dans la jambe, le blessant grièvement. Nous dûmes transporter le malheureux sur une civière. Il souffrait terriblement et nous ne pouvions pas lui procurer les soins nécessaires faute de moyens. Comme nous étions très épuisés par le brancardage, nous prîmes de plus en plus de retard sur le groupe. Alors, on nous fit poser la civière à terre et un soldat abattit froidement notre camarade, devant nos yeux horrifiés.

Lors du transfert vers le centre de regroupement, nous passâmes la nuit à la belle étoile, dans un pré, sous une pluie battante. Il nous fut interdit de nous lever sous peine d’être abattus par des rafales de mitraillette qui déferlaient toutes les 5 minutes au-dessus de nos têtes. Nous étions dans l’obligation d’uriner à l’endroit même où nous nous trouvions.

Transportés dans les wagons, nous étions parqués comme des animaux. Souvent, je me demande comment j’ai pu vivre un tel cauchemar et m’en sortir !

Bobruisk : Les conditions de vie étaient particulièrement éprouvantes avec un boulot épuisant en forêt durant un hiver très, très rigoureux. J’ai énormément souffert du froid, faute de pouvoir me mettre quelque chose sur le dos. Lors de la coupe de roseaux effectuée dans une tourbière en été, nous étions dans l’eau jusqu’à hauteur des genoux, et ce à longueur de journée. J’ai été menacé de déportation en Sibérie par des chefs polonais.

J’ai souffert de la faim en permanence, été comme hiver. Le plus éprouvant resta la faim, toujours la faim. En hiver, le froid fut horrible. Quelquefois, nous devions supporter cet air glacial durant l’appel qui prenait des heures lequel, ajouté au manque de nourriture, nous rendait malades. A cela s’est ajoutée la corvée de latrines pour laquelle j’ai été puni deux fois. J’ai été rapatrié en France le 3 mars 1946.»

 

Heitz Armand, né en 1927


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