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Juncker Lucien

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« Incorporé le 13 janvier 1943 dans l’armée allemande, j’ai connu mon plus grand choc émotionnel à Berlin où, pendant 15 jours, nous avons extrait les morts et blessés des ruines causées par l’aviation alliée. Au cours de ces nuits de sauvetage, nous redoutions à notre tour d’être ensevelis sous les décombres face aux raids imprévisibles.

J’ai été envoyé trois mois plus tard à Dniepropetrovsk et j’ai participé à des combats contre les partisans du côté de Kalinkowitsch. J’ai failli être fusillé par un Leutnant pour avoir simulé l’existence d’une attaque ennemie. En effet, étant de garde, j’avais balancé une grenade dans la forêt, ameutant ainsi tout le quartier. Aussitôt un assaut avait été ordonné par mon officier.

J’ai été blessé le 29 septembre 1943 par des éclats d’obus au bras et au pied gauches.

3 avril 1944 : date de ma capture. Je m’étais caché dans une maison. Marchant vers le camp d’Odessa, les Russes nous faisaient avancer à coups de crosse. Suite aux coups reçus à l’époque, les déformations de ma colonne vertébrale sont encore bien visibles sur les radiographies actuelles. Les plus faibles et les malades étaient achevés au motif qu’ils ne pouvaient plus suivre. En décembre 1944, pendant le transport à Tiflis, on dénombra 10 à 15 morts dans mon wagon. Tous les matins, nous devions traîner, à quatre porteurs, les morts de la nuit jusqu’au wagon-corbillard de queue. En comptant : « 1, 2 et 3 », nous les jetions sur le tas où d’autres prisonniers les empilaient comme du vulgaire bois. Parmi les cadavres balancés se trouvait un compatriote de Steinbrunn.

Ayant atterri au camp de Tiflis, j’y ai attrapé le typhus qui m’a conduit au lazaret. Tambow a été pour moi le camp de rassemblement pour le rapatriement des Français. C’était le séjour le plus court de ma captivité (deux mois). J’ai été rapatrié le 4 octobre 1945. Plus d’une fois, en rêve, je revois mon meilleur copain, West Emile de Thionville. Nous avions fait toute la guerre ensemble et projeté de nous rendre aux Russes. Au dernier moment, il m’a dit : « Je ne fais rien contre le destin. » Il m’a embrassé et il est reparti du côté allemand. Moi, je me suis rendu. Le lendemain de ma reddition, des prisonniers provenant de ma compagnie, capturés à leur tour, m’ont appris que West avait été tué.» Juncker Lucien, né en 1921



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