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« En juin 1940, à Saint-Sauveur-le-Vicomte, localité proche de Cherbourg, j’ai participé à de furieux combats rapprochés à la grenade, faits d’une violence inouïe. Les Stukas ont cherché à nous réduire en miettes. J’étais chef de groupe au 27ème Régiment d’Infanterie Coloniale mixte composé de Sénégalais. Nous avons été faits prisonniers par la S.S. Totenkopf qui s’est fait un plaisir de photographier les Nègres sous toutes les coutures !

Cet engagement héroïque est resté gravé à jamais dans ma mémoire.

Incorporé de force dans l’armée allemande le 23 mars 1943, j’ai été envoyé en Allemagne et au Danemark pour ma période d’instruction. Muté dans un Kampfgruppe, j’ai participé à divers combats sur les fronts de Tarnopol-Vinitza-Podolsk. Tympan crevé, éclats de grenade à la mâchoire, balles dans la jambe et dans la cuisse ont été mon lot de blessé. Ces blessures ont vite cicatrisé (le constat du médecin-major de Thionville me le précisa lors d’une permission).

En rase campagne, les mitraillages de l’aviation russe provoquaient des dégâts : de nombreux camarades touchés se pliaient en arc, leur corps s’affaissant ensuite au milieu de cris épouvantables. Tel autre gars, décapité en pleine course, son fusil-mitrailleur à la hanche, courut encore quelques mètres sous les crépitements de son arme qui semblait ne plus s’arrêter. Mon copain de Thionville mourut dans mes bras, fauché presque à bout portant.

Je ne veux pas décrire les autres sauvageries. (Je suis ému au point que je ne peux presque plus écrire).

Encerclé durant une retraite difficile, j’ai été capturé au cours d’un combat le 31 mars 1944 à Kamenetz-Podolsk, dans la direction d’Odessa. (Ma famille fut avisée de ma disparition par une lettre datée du 17 mai 1944). J’étais porteur de lunettes et celles-ci me furent enlevées le jour même de la capture, ainsi que tout le reste.

Enfermés à quinze individus et plus dans un local pour être questionnés, on venait nous chercher à tour de rôle. Chaque audition m’apparaissait bien longue. On entendait parfois au dehors des rafales de mitraillette. Si l’un ou l’autre des interrogés revenait parfois, j’ignorai par contre le sort réservé aux autres prisonniers.

Liquidés ? Je ne puis affirmer s’il y eut exécution ou non, mais ce que je peux dire, c’est que je n’ai plus rencontré bon nombre de ces malheureux gars qui nous accompagnaient. Et lorsque les Russes appréhendaient trois ou quatre nouveaux captifs, la terrible épreuve nerveuse continuait. Allaient-ils, eux aussi, être zigouillés ?

Combien d’autres inconnus furent abandonnés au bord des chemins pendant les interminables marches ?

J’ai transité par les camps de Kiev et de Saslav, puis par l’hôpital spécial 1889 de Rekytianka dans l’Oural avant de parvenir dans celui de Tambow. Je ne sais toujours pas de quels moyens de locomotion nous avons bénéficié pour atterrir dans ces différents endroits, ma déchéance physique empêchant toute perception spatio-temporelle de l’existence. Au camp de Saslav (appelé ainsi pour l’avoir entendu prononcé tel que par des prisonniers roumains et polonais), j’ai été désigné pour participer à la corvée des morts. Nous avons évacué tous les sous-sols du camp, là où les cadavres avaient été empilés comme des stères de bois. Nous les avons empilés sur des charrettes (arabas). Après une marche d’environ une heure, nous avons déchargé ces pauvres objets dans d’immenses fosses communes. Il fallait y descendre pour aligner les dépouilles et les ranger ; je me trouvais au fond. Le bruit des corps qui s’affaissaient, tout comme les chocs qui résultaient de leur chute dans le trou me poursuivent encore aujourd’hui et continuent de provoquer en moi du dégât moral et psychique.

Comment pourrais-je oublier ces centaines de cadavres enterrés au fin fond d’une forêt et dont je ne connaîtrais, hélas, jamais les noms ? J’ai gardé le bon souvenir d’un jeune soldat allemand de 17 ans et demi qui était à l’hôpital avec moi. (Il chercha pendant 25 ans à me localiser et me retrouva). J’avais tout fait pour qu’il survive.

J’ai connu des événements éprouvants (classiques, me direz-vous !) à Tambow : corvées, faim, poux, dysenterie, cauchemars, incessante peur de mon devenir, claustrophobie dans ces horribles baraques, fouilles, isolateur où les trépas étaient fréquents, bania, enfin le spectacle lamentable de quelques-uns prêts à se battre pour une tête de poisson. Dans la carrière de pierres, j’ai extrait et chargé des moellons. J’ai travaillé également dans un garage et bossé à bord d’un kolkhoze dans un commando de désherbage et de fauchage.

 


Je suis rentré le 24 octobre 1945 à Chalon-sur-Saône. »

Muck Hubert, né en 1920


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