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« 16 avril 1943, départ à Wittenberg an der Elbe dans l’infanterie avec le grade maintenu d’Unteroffizier car j’avais été précédemment sergent-chef dans l’armée française.

Service actif dans le saillant de Vitebsk-Orcha. La boue au moment du dégel, il faut avoir vécu cela !

Le 21 mars 1944, à Poniwje, au cours d’une attaque ennemie, je fus enterré dans notre abri. Après m’être extrait tout seul de l’effondrement, (efforts qui me prirent une ou deux heures), commotionné par le souffle de l’explosion et sans doute perturbé par ailleurs, je courus et errai sans but sur environ 5 km ; au vu de mon camouflage blanc on me confondit même avec un fantassin russe, aux dires de mes sauveurs. Finalement, je fus récupéré par les servants d’une batterie de canons légers jumelés de la D.C.A. (Vierling Flak).

Deux jours plus tard, dans le même secteur, je fus pris dans un arrosage de katiouchkas (lance-roquettes multi-tubes d’artillerie) pendant plus d’une heure, dans un tohu-bohu démentiel où je crus devenir fou, avec les tirs de fauchage au travers et en profondeur de nos lignes, sur environ 2 km².

Derniers combats sur le front à Boguschewskoje. Fait prisonnier le 7 juillet 1944 à Wolossioj, dans la région de Minsk, je m’étais caché dans un tas de foin durant trois jours afin d’échapper aux troupes d’assaut russes.

Dans la marche de rassemblement qui dura cinq ou six jours en direction de Minsk, les Voïna plenny étaient sous la direction et la garde des partisans russes. En raison du troupeau qui grossissait sans cesse et rendait la colonne trop élastique, tout traînard ou éclopé se trouvant en queue de colonne, était froidement abattu et balancé sur les abords du chemin.

Tout au début de ma captivité, j’ai assisté à l’exécution de cinq prisonniers allemands choisis au hasard parmi une quinzaine de leurs compatriotes, par des soldats blessés de l’Armée Rouge, portant des pansements frais.

Tambow : Je me souviendrai à jamais de ce meeting tenu un dimanche d’octobre 1944, où Monsieur Ollary, le commissaire politique, nous annonça qu’on ne rejoindrait pas la France et que nous passerions l’hiver au camp, malgré les promesses faites par le général Petit ! Durant l’hiver 1944-45, suite à l’accumulation de trois cents cadavres ne pouvant être enterrés par suite du froid, il nous fallut les évacuer en vitesse, de nuit, sur des traîneaux et des tracteurs, car une visite du camp avait été annoncée, c’était soi-disant une commission alliée de la Croix-Rouge. Nous nous sentions abandonnés par notre gouvernement. Les Russes nous considéraient comme des volontaires de la Wehrmacht. Las, démoralisés, fatalistes, nous étions devenus pareils à des parias, à des minus, avec des sentiments d’infériorité, de honte et de culpabilisation. J’ai l’impression que nous avons été soumis à un grand lavage de cerveau collectif à Tambow qui nous a marqués pour la vie. Après l’oppression nazie subie dans la fleur de l’âge, après toutes les épreuves vécues au front, nous étions particulièrement malléables et désarmés face à l’idéologie rouge sans pouvoir la contrebattre ou la contester.

 

La captivité avec toutes ses vicissitudes nous a donné le coup de grâce. »

Rémond Emile, né en 1916


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