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Rerkling Bernard

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« Après mon incorporation le 23 novembre 1943, ne pouvant admettre de porter l’uniforme allemand qui était contraire à mon idéal, j’ai tenté de me soustraire à la Wehrmacht. A mon arrivée à la caserne, j’ai fait la connaissance d’un Lorrain qui allait être démobilisé à la suite d’une incontinence urinaire. Pourquoi ne pas tenter la réforme militaire en simulant les mêmes symptômes que lui ou d’autres pathologies ? J’ai été hospitalisé le 9 décembre pour appendicite. Opéré, on me soigna également pour maladie de nerfs et troubles psychogènes de la vessie. Mais, ne pouvant plus supporter ni endurer les soins de cheval prodigués et les traitements et chocs électriques ad hoc, j’ai dû me résigner à revêtir la casaque feldgrau. A la sortie de l’hôpital le 10 mars 1944, le médecin me fit savoir que si je recommençais à simuler pareille maladie ou si je faisais savoir à d’autres malins les stratagèmes utilisés, je passerais en conseil de guerre.

C’est le 20 août 1944, lors de l’assaut d’un Stosstrupp russe qui passa à droite de notre groupe, que le contact avec le reste de notre compagnie se rompit. Deux de mes camarades alsaciens et moi-même, nous décidâmes de rejoindre les lignes soviétiques. Je passai le premier, un chiffon blanc dans une main et de l’autre un ruban bleu blanc rouge. Nous courûmes vers les Russes.

Vive fut notre déception ! Trois fois, un Russe essaya de m’abattre ; à chaque fois son arme s’enraya. Sa grenade jetée dans nos jambes n’eut pas l’effet meurtrier escompté. Mais, à mes côtés, un camarade de Dambach fut abattu d’une rafale de mitraillette dans la nuque. Nous tombâmes pour ainsi dire complètement traumatisés et apeurés, entre les mains de nos alliés libérateurs. Il m’est impossible d’oublier ces instants tragiques.

Captif à Tambow, j’ai transporté sur traîneau la soupe pour la quarantaine, de janvier 1945 jusqu’à la fonte des neiges, parfois sous des températures allant jusqu’à -40 °C.

J’ai assisté au suicide d’un prisonnier alsacien qui s’est jeté dans le puits du camp, installé devant les cuisines.

En rêve, je revois cette vie misérable du camp : elle passe comme un film que l’on ne peut pas arrêter.

 

J’ai été rapatrié vers la France le 29 août 1945. »

Rerkling Bernard, né en 1924


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