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Quelques passe-frontières ont réussi à rejoindre l'intérieur après de nombreux avatars ...

Houllé Justin †et Kleinhentz Emile†

Dans la ville de L’Hôpital, début 1942. Les Allemands ont parfois été accueillis avec haine et mépris. Ainsi dans la boulangerie attenante à la boucherie où je travaillais, un soldat allemand faisait la queue en attendant son tour.

« Bonjour, du pain, je suis pressé, mes camarades m’attendent. - Vous avez vos cartes de rationnement ? - Non. - Pas de pain, alors. - Quelle ingratitude, Madame ! Nous, vos frères de sang, nous vous avons sorti de la m... française ! - Oh, vous savez, il valait mieux nous y laisser ! » Notre départ Avec Justin Houllé, dit Willy, nous avons décidé de quitter Farébersviller pour nous soustraire à une prochaine incorporation. Nous savions que tôt ou tard nos classes d’âge (années 1914 et 1917) seraient appelées.

Le1 er juin 1942, après une virée dans les bistrots du secteur, nous avons pris cette décision en cours de route vers 4 heures du matin, en ne mettant pas nos autres camarades dans la confidence. Pourquoi ? Lorsque nous avions voulu partir une première fois avec une demi-douzaine de copains, les parents avaient fait un tel éclat que l’on s’est abstenu de les aviser à nouveau. J’étais rentré chez moi, j’avais mis un double accoutrement et emporté deux slips, deux chemises, deux chandails dans une petite valise puis j’avais avisé ma mère qui ne fit pas d’objections. Mon frère Jean l’entendant, partit se préparer. Je retrouvai Willy somnolant chez sa grand-mère. Schangs’ Mutter pleura en nous voyant partir. Nous décidâmes de rejoindre la gare de Farschviller, où l’on ne nous connaissait pas.

Jean, mon frère, nous rejoignit en cours de route, marchant le long des rails. Nous lui fîmes remarquer que s’il partait, il mettrait ses parents dans de beaux draps car les représailles n’allaient pas tarder à s’abattre sur eux. Il était de la classe 1920 qui était consignée, ses contingents étaient prévus pour être incorporés prochainement. Il figurait sur les registres et son départ clandestin pouvait préfigurer des ennuis certains pour la famille. Le cœur serré, il se rangea à nos arguments et repartit à la maison. (Il fut plus tard arrêté sur la ligne de démarcation, violemment battu par la Gestapo à cause d’un béret basque caché sur lui.

Pendant deux mois, il garda de gros coquards dans la figure. Du fort de Queuleu il fut envoyé en prison, puis il fut à nouveau déporté.) Le train entra en gare vers 10 heures. Nous montâmes à contre-voie, un contrôleur réclama les billets dans le train. Ça commençait mal. Je pus donner le change en disant à Justin, tout essoufflé : « ça va faire deux fois ce mois-ci que nous arrivons en retard pour travailler à la boucherie de Sarreguemines. Il ne faudrait plus sortir aussi tard dans les bistrots. »

Le contrôleur avala nos dires et nous gratifia d’une petite amende de 1 Mark. Dans la Cité des faïenciers, je troquai mes dernières cartes de rationnement contre du tabac. Puis nous voilà partis direction Vic-sur-Seille à travers la campagne. Vu la haute taille de mon ami, il fallait à chaque passage dans les barbelés entourant les parcs, que je bande les muscles de mes bras pour agrandir le passage entre les fils. En cours de route nous vîmes soudain déboucher d’un sentier deux cavaliers, des gendarmes allemands. Une haie providentielle nous cacha à leur vue et nous nous aplatîmes lorsqu’ils passèrent près de nous. Il faut savoir que, depuis l’introduction du Service du Travail Obligatoire, beaucoup de jeunes Lorrains cherchaient à s’enfuir de leur province pour ne pas endosser l’uniforme vert-de-gris. Les patrouilles motorisées et celles à pied accompagnées de bergers allemands sillonnaient la zone interdite longeant la ligne de démarcation.

Un vieil homme nous offrit du lait en cours de route. Nous étions à nouveau pleins d’entrain. Vic-sur-Seille n’était plus trop loin. Nous redoublions de prudence. Tous les 50 mètres, nous nous arrêtions pour écouter. Une passerelle jetée sur la Seille nous parut suspecte. Nous la traversâmes finalement sans problème. A Vic-sur-Seille, nous avons frappé à des volets. Cette nuit-là, nous fûmes hébergés dans une maison accueillante. On nous proposa des tartines beurrées au miel et nous pûmes dormir dans la paille.

Après ce repos réparateur, nous avons pris les "Rapides de Lorraine" pour Nancy située en "zone rouge" . Nous connaissions bien Nancy, comme ville-garnison. J’avais fait mes classes au 8ème régiment d’artillerie divisionnaire, tandis que Justin avait servi dans l’aviation à Essey-lès-Nancy. Je pensai retrouver le patron Muller, propriétaire d’un restaurant sur la place Stanislas. Bon Dieu, il n’était plus là ! Une dame, gérante de l’hôtel, comprit vite en nous voyant avec nos deux valises que nous étions des réfractaires. Elle nous proposa le déjeuner et le dîner à titre gratuit. Nous prîmes sans encombres le train jusqu’à Paris. En route vers la Charente, le train s’arrêta près d’une gare car un bombardement avait eu lieu. Méfiants, nous sautâmes sur le talus. Installés dans le hall, nous fîmes semblant de nous assoupir, ayant l’air de cheminots fatigués. Lorsque le sifflet du chef de gare annonça le départ, nous retournâmes dans notre compartiment. Peu après, on entendit au bout du wagon : « Papieren, Bitte.» Rapides comme l’éclair, chacun d’entre nous réagit au quart de tour. Je filai vers la queue du convoi et me hissai sur les tampons (Puffer) pour m’y cacher. Au bout d’une demi-heure dans cette position inconfortable et brinquebalante sur les crochets d’attelage, je me décidai à revenir dans le coupé. Je pus agripper une barre, réussir un rétablissement sur le marchepied extérieur et ouvrir la porte du compartiment. Je retrouvai ma mallette intacte, mais pas mon ami ! Enfin Willy apparut heureux d’avoir échappé au contrôle.

Un postier l’avait caché en le recouvrant de colis et de paquets. D’Angoulême, nous reprîmes le train vers Chalais. Affamés, nous mangeâmes les deux dernières boîtes de sardines et un restaurateur compatissant nous fournit du pain. Je retrouvai mon frère Kleinhentz Joseph resté en Charente avec sa famille. Je travaillai d’abord chez un exploitant-viticulteur grossiste. Le salaire y était maigre. Je trouvai un nouveau job à la briqueterie spécialisée en pierres réfractaires. J’y restai un an et demi. Justin travaillait dans les forêts comme bûcheron et je le revois encore attelant ses deux ânes au charroi. Avec Klein Willy et Julien Steinmetz originaires de Henriville, j’entrai dans les F.F.I . Nous avons ratissé les bois à la recherche des miliciens. Mais mon vieux métier reprit ses droits dans cette armée de l’intérieur.

J’étais boucher dans le civil, et cela m’a toujours réussi. Déjà en 1940, j’étais le boucher du régiment lors de notre montée vers la Belgique. Sous les bombes, on y est d’ailleurs plus vite sorti que rentré ! Nous avons pu sauver un camion de vin (?) de la frénésie des Stukas, pas pour longtemps car leurs zélés pilotes revinrent et lancèrent des bombes sur un pâté de maisons. A vingt mètres de notre cave, une bombe éclata, tuant un cheval. Les gens nous mirent en cause et nous demandèrent de déguerpir.

Fait prisonnier à Pithiviers, je restai quatre semaines dans le camp avant d’être démobilisé comme Alsacien-Lorrain. Me revoilà bien sûr, en 1944 boucher attitré des F.F.I . Je leur servis un taureau attrapé dans les marais salants longeant l’île d’Oléron. Nos patrouilles nous ramenèrent une sentinelle autrichienne faite prisonnière. Je fis merveille dans l’art d’élaborer les saucisses lorraines que mes compagnons d’armes ne connaissaient pas. Tout le monde sait que le cochon transforme les cochonneries qu’il avale en cochonnailles délectables et mes produits trouvèrent une place d’honneur sur la table du capitaine Leclerc (un homonyme)..... »


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